L’ancien président nigérian Muhammadu Buhari est décédé ce samedi à l’âge de 82 ans, dans une clinique londonienne où il était en observation depuis plusieurs semaines. L’annonce de son décès a été faite par son ancien porte-parole via un message publié sur les réseaux sociaux. Le gouvernement nigérian n’a pas encore réagi officiellement.

Né le 17 décembre 1942 à Daura, dans l’État de Katsina, dans le nord du Nigeria, Muhammadu Buhari entame très tôt une carrière militaire. Il intègre l’armée nigériane en 1961 et se distingue au sein des forces armées, notamment durant la guerre civile nigériane (1967-1970). Formé dans plusieurs académies militaires à l’étranger, dont en Inde, au Royaume-Uni et aux États-Unis, il gravit rapidement les échelons jusqu’à atteindre le grade de major général.

Buhari accède pour la première fois au pouvoir à la faveur d’un coup d’État militaire en décembre 1983, mettant fin au régime civil de Shehu Shagari. Il dirige alors le Nigeria comme chef de la junte militaire de 1983 à 1985. Son régime, bien que court, est marqué par une lutte intense contre la corruption, un style de gouvernance autoritaire et des politiques d’austérité impopulaires. Il est renversé en août 1985 par un autre coup d’État mené par le général Ibrahim Babangida.

Après plusieurs années de retrait, Muhammadu Buhari entame une reconversion politique. Il fonde le Congrès des progressistes (APC) et se présente à plusieurs élections présidentielles. Après trois tentatives infructueuses, il remporte finalement l’élection présidentielle de 2015, devenant ainsi le premier opposant à battre un président sortant dans l’histoire démocratique du Nigeria.

Réélu en 2019 pour un second mandat, il gouverne jusqu’en mai 2023. Son action à la tête du pays est marquée par une volonté de moderniser l’économie, de lutter contre le terrorisme – notamment face à Boko Haram – et de renforcer la discipline budgétaire. Toutefois, ses mandats ont également été critiqués pour leur gestion de la sécurité intérieure, les tensions ethniques, et un bilan économique mitigé, notamment dans les domaines du chômage et de la pauvreté.

Reconnu pour son intégrité personnelle et son austérité, Muhammadu Buhari laisse derrière lui une image ambivalente : celle d’un homme d’État rigoureux et patriote pour certains, celle d’un dirigeant rigide et peu réactif aux mutations sociales pour d’autres. Son style sobre, sa méfiance envers l’élite politique et ses longues absences pour raisons de santé – notamment à Londres – ont souvent alimenté les spéculations et critiques.

Sa disparition intervient deux ans après son retrait de la vie politique, dans un pays toujours confronté aux défis qu’il avait tenté de relever : insécurité, corruption, inégalités sociales, et instabilité économique.

Les hommages officiels sont attendus dans les prochaines heures, tandis que les Nigérians s’apprêtent à faire le deuil d’une figure marquante de leur histoire contemporaine.

Jeremy Ahossou