Face aux tensions politiques croissantes en Côte d'Ivoire, le président français Emmanuel Macron aurait envoyé l'ancien président Nicolas Sarkozy pour tenter de convaincre Alassane Ouattara de renoncer à un éventuel quatrième mandat en 2025. Selon Africa Intelligence, Sarkozy est arrivé à Abidjan avec pour mission d’influencer le président ivoirien vers un retrait du pouvoir, dans le but de préserver la stabilité régionale.
L'implication française dans les affaires ivoiriennes n’est pas nouvelle et rappelle le rôle majeur joué par Paris lors de l'accession au pouvoir d'Alassane Ouattara en 2011. À l'époque, la France avait soutenu Ouattara face au président sortant Laurent Gbagbo, refusant de reconnaître sa victoire. La crise post-électorale avait dégénéré en conflit, et ce sont finalement les forces françaises, avec l’opération Licorne, qui ont capturé Gbagbo pour installer Ouattara à la tête du pays. Ce soutien direct a renforcé l’image d’une France jouant un rôle paternaliste en Afrique, où elle intervient pour influencer les transitions politiques, souvent sous couvert de maintien de la stabilité.
Le choix de Sarkozy pour cette mission reflète l’espoir de l’Élysée que les liens personnels entre l’ancien président français et Ouattara, bâtis pendant la crise de 2010-2011, faciliteront le dialogue. Macron, en s'appuyant sur cette relation, espère persuader Ouattara d'envisager un passage de témoin en 2025, afin de réduire le risque de violence politique en Côte d'Ivoire. L’Élysée craint qu’une nouvelle candidature d'Ouattara ne ravive des divisions internes et n’engendre une crise similaire à celle de 2010, qui avait traumatisé le pays et la sous-région.
Pour la France, la Côte d'Ivoire reste un pilier stratégique de sa présence en Afrique de l’Ouest. Le retrait éventuel de Ouattara serait perçu comme un pas vers la modernisation de la politique ivoirienne et l’ouverture à une nouvelle génération de leaders, un changement que Macron juge crucial pour garantir une stabilité durable. Mais cette démarche s’inscrit dans un contexte où le rôle paternaliste de la France est de plus en plus contesté, en Côte d'Ivoire comme dans d’autres pays africains, où les opinions publiques expriment leur ras-le-bol face à ce qu’elles perçoivent comme une ingérence.
Si l’Élysée insiste sur la nécessité d’une transition pacifique, plusieurs voix dénoncent cette tentative comme une énième manifestation du « paternalisme français » en Afrique, où la France continue de dicter des lignes politiques aux dirigeants de ses anciennes colonies. Ce schéma, selon ses critiques, vise souvent à préserver des intérêts économiques et stratégiques plutôt qu'à soutenir une réelle autonomie politique des nations africaines.
Alassane Ouattara n'a pas encore officiellement annoncé sa décision concernant 2025, mais cette pression française pourrait avoir des conséquences inattendues, d'autant que certains membres de son entourage pourraient résister à l’idée de son retrait. Dans ce contexte, le positionnement de la France reste sujet à débat, perçu par certains comme un moyen d'éviter une nouvelle crise, mais par d'autres comme une tentative d'influence pour orienter la politique ivoirienne en faveur de ses propres intérêts.
Jeremy Ahossou