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Burkina Faso - Lâcher de moustiques génétiquement modifiés : La CVAB hausse le ton, le Gouvernement tranche

last updated: Saturday, August 23, 2025 1:23 AM
Source: Nouvelle Afrique

Moustique

Sous la vive contestation de la Coalition de veille sur les activités biotechnologiques (CVAB), le Gouvernement burkinabè a annoncé ce vendredi 22 août 2025 la fin des activités du projet Target Malaria sur toute l’étendue du territoire national. Cette décision fait suite au lâcher, le 11 août dernier, de 75 000 moustiques mâles biaisés génétiquement modifiés dans le village de Souroukoudingan, province du Houet.

Réunis en conférence de presse le jeudi 21 août 2025 à Ouagadougou, plusieurs organisations membres de la CVAB, dont le FIAN Burkina Faso, le Collectif des Organisations et Associations sur les Semences Paysannes (COASP), la COPAGEN, le CNABio et AfriTAP, ont exprimé leur indignation face au projet.

Dans sa déclaration liminaire, la Coalition a dénoncé un processus opaque. « Ce lâcher ne nous offrait pas la possibilité d’exercer un recours à temps utile », a fustigé la CVAB. « Nous doutons même de la validité du consentement libre et éclairé qu’auraient donné les populations concernées, car la question des moustiques génétiquement modifiés est hautement technique. »

Les représentants de la Coalition ont également remis en cause la pertinence scientifique du projet : « La technologie du forçage génétique est mal connue et ses conséquences sont potentiellement irréversibles », a averti la CVAB. « Nous appelons au strict respect du principe de précaution, car cette technologie est capable d’exterminer toute une espèce. »

Sur le plan éthique, la Coalition a mis en garde contre une dérive. « Même si l’homme est l’espèce la plus évoluée, de quel droit peut-il décider de supprimer une autre espèce ? » a-t-elle interrogé.

Tout en réaffirmant son engagement dans la lutte contre le paludisme, la CVAB a invité le gouvernement à explorer d’autres pistes. « Vaincre le paludisme est possible par des méthodes plus sûres. L’Algérie et le Cap-Vert en sont des exemples récents. Ces pays n’ont pas eu recours aux moustiques génétiquement modifiés », a rappelé la Coalition.

Elle a proposé des solutions éprouvées, telles que l’utilisation de moustiquaires imprégnées, la pulvérisation intra-domiciliaire, l’assainissement du cadre de vie et la mise en œuvre de programmes socio-économiques durables.

 

Le Gouvernement tranche

Face à la montée des contestations, l’Exécutif burkinabè a tranché en faveur de l’arrêt du projet. Dans un communiqué signé par le Secrétaire général du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Pr Samuel Paré, il est indiqué : « Il est mis fin à toutes les activités du projet Target Malaria sur toute l'étendue du territoire national. Les enceintes contenant les moustiques génétiquement modifiés sont sous scellés depuis le 18 août 2025 et tous les échantillons seront détruits suivant un protocole indiqué. »

Le Gouvernement a aussi rassuré quant à la gestion des moustiques déjà libérés : « Les moustiques mâles biaisés génétiquement modifiés sans impulsion génétique lâchés dans le village de Souroukoudingan ont été soigneusement traités par les services techniques compétents. »

La CVAB a pour sa part réclamé un débat public : « Nous proposons un débat impliquant toutes les parties prenantes afin d’alimenter la controverse pour que jaillisse la lumière », a-t-elle plaidé.

L’affaire Target Malaria, désormais suspendue, ouvre un vaste chantier de réflexion au Burkina Faso sur l’usage des biotechnologies et la gestion des risques environnementaux et sanitaires.

 

Cyril DAKPITI


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