« Depuis mai 2023, la ville de Koro accueille de milliers de réfugiés ayant fui les violences dans la zone des 3 frontières au Sahel dépassant largement la taille de la population hôte qui est de 56 729 personnes », alerte Médecin sans frontière (MSF) qui qualifie également la situation humanitaire, marquée par une pénurie d’eau et d’abris de très préoccupant.
En effet, face aux besoins croissants et à la faible mobilisation des acteurs, Médecin sans frontière tire la sonnette d’alarme.
Toutefois, soutient l’organisation humanitaire, en collaboration avec les autorités locales, ses équipes apportent une assistance médicale aux réfugiés et leur facilitent l’accès à l’eau potable dans la ville.
« Les premiers réfugiés ont commencé à arriver en mai 2023 dans la ville de Koro venant des régions frontalières. La vague s’est intensifiée durant les deux premiers trimestres de 2024», rappelle MSF.
Et de poursuivre : « En juillet dernier, les équipes de MSF ont d’ailleurs dénombré environ 82 000 personnes réfugiées dans la ville de Koro. La Commission nationale chargée des Réfugiés (CNCR) de son côté a pu enregistrer 46 128 réfugiés en septembre et souligné qu’il reste encore plus de 11 000 personnes en attente d’enregistrement ».
Aussi, signale MSF, « les autorités locales parlent à leur tour de plus de 100 000 personnes au total cherchant refuge dans tout le cercle de Koro ».
Et de souligner « Tous ces chiffres montrent qu’aujourd’hui le nombre de réfugiés dépasse largement la taille de la population hôte qui est de 56.729 personnes, faisant de cette ville malienne un carrefour où les populations fuyant les violences dans cette région du sahel trouvent un abri ».
Une pénurie en eau et abris à Koro-ville
Selon Médecin Sans Frontière, la ville de Koro était déjà confrontée à un problème récurrent en eau potable. La présence des réfugiés a augmenté la demande en eau accentuant davantage la pénurie en eau. Le nombre de logement disponible pour ces réfugiés fait aussi défaut.
« C’est la première fois que la ville de Koro reçoit un nombre de réfugiés plus élevé que la population autochtones », témoigne une autorité locale.
Et d’ajouter : « Pour celles et ceux qui connaissent Koro et ses problèmes d’eau, l’arrivée de ces réfugiés rend l’accès à l’eau encore plus difficile pour toute la ville et engendre un problème d’abris ».
Aussi, déplore-t-elle, « Plus de 6 300 familles sont sans abris et se sont installés dans la cour de la Maison de la Femme, un établissement public qui sert de lieu de transit aux réfugiés en attendant d’avoir un local. Seulement 1 200 ménages ont reçu une aide alimentaire couvrant deux mois ainsi qu’une distribution d’argent liquide qui a été faite uniquement à 1 000 personnes de la part d’autres acteurs présents ».
Avant de reconnaitre : « Le besoin en eau a été en grande partie résolu par Médecins Sans Frontières qui a installé des points d’eau dans la ville afin de faciliter un accès gratuit à tous les réfugiés ».
Des structures de santé débordées face à une réponse insuffisante
Face à cette crise, MSF a déployé son équipe pour appuyer le centre de santé communautaire central de Koro afin de prodiguer des soins gratuits à tous les réfugiés malades, installé des points d’eau dans la ville et construit des latrines.
« Notre intervention est loin de couvrir tous les besoins », reconnait volontiers Jonathan Tumbwé, Coordinateur de MSF à Koro.
« Le nombre de malades consultés au centre de santé central où nous intervenons est passé de 300 à plus de 1 000 le mois ; les accouchements de 10 à 37 ; aussi plus de 15 enfants souffrent de malnutrition aigüe sévère sur le total d’enfants dépistés chaque mois. Nous n’arrivons pas à couvrir tous les besoins de ces réfugiés. Certains d’entre eux vivent dans des familles d’accueil, d’autres sont dans des logements dont ils payent la mensualité. Nous avons aussi un grand nombre de réfugiés qui n’ont pas d’abris et qui sont exposés aux intempéries. Ils n’ont pas de vivres alimentaires et manquent d’article de ménages essentiels », détaille le coordinateur de MSF à Koro.
Et d’ajouter : « Nous sommes à une phase de réévaluation de notre stratégie d’intervention pour voir comment rehausser notre niveau de réponse face à une demande croissante. Car à mesure que les réfugiés arrivent, les besoins augmentent. Nous demandons une assistance en vivres pour tous les réfugiés afin de prévenir une situation de malnutrition et de construire des abris pour eux ».
Par ailleurs, dénonce Jonathan Tumbwe : « Il n’est pas normal que des personnes déjà vulnérables, et qui se trouvent en situation de besoin d’aide, aient à payer un loyer ».
Pour sa part, la Commission Nationale Chargée des Réfugiés (CNCR) du pays a également lancé de son côté un appel afin qu’une réponse adaptée à cette crise soit déployée :
« Face aux nombreux besoins constatés et nos moyens limités, nous réitérons notre appel à la mobilisation de tous les acteurs humanitaires, contributeurs et bailleurs afin d'apporter une assistance permettant de soulager ces populations ayant trouvé refuge sur le territoire malien, mais également les populations hôtes positionnées en premières dans l'accueil des réfugiés ».
Ainsi, à Bandiagara chef-lieu de région d’où relève administrativement la ville de Koro, MSF a déployé des projets visant à apporter une assistance médico-humanitaire d’urgence aux populations victimes des conflits armés à travers un appui aux hôpitaux de Koro, de Bankass et Bandiagara pour la prise en charges des afflux massifs de blessés.
Dans la même dynamiques, ses équipes assurent aussi un volet de protection et d’assistance psycho-sociale. Au niveau communautaire, les équipes de MSF travaillent également dans les centres de santé de Diankabou, Dioungani, Mory et Baye, ainsi que dans 14 sites de soins essentiels communautaires afin d’apporter des soins curatifs et préventifs de base aux populations et assurent la référence des patients vers les structures de prise en charge.
Amadou Traoré